Les théories qui ont été étudiées dans la partie précédente ont pour point commun d’expliquer le commerce international par l’existence de différences entre pays : différences de productivité (Ricardo), de dotations factorielles (Heckscher-Ohlin) ou technologiques. Le commerce international est alors un échange de différences (on parle d’échanges interbranches) : les pays échangent ce qu’ils ne produisent pas eux-mêmes ou ce que les autres produisent mieux.
On a ainsi longtemps pensé que si tous les pays avaient les mêmes caractéristiques productives (productivité, dotations), aucun n’aurait d’avantage comparatif dans la production de quelque bien ou service que ce soit, et qu’aucun n’aurait de raison de se spécialiser et d’échanger.
Mais il y a bien d’autres raisons de se spécialiser. Au cours des années 1980, les économistes Avinash Dixit, Elhanan Helpman et Paul Krugman ont développé des modèles du commerce international dans lesquels les échanges ne sont pas dus à des différences entre les pays, mais aux rendements d’échelle croissants.
Pour le démontrer, revenons à l’exemple de Greta sur l’île des Délices et de Carlos sur l’île du Bonheur : supposons que chacun soit aussi productif et ait les mêmes dotations factorielles (terres en même quantité et de qualité identique). Ils sont tous les deux capables de produire des pommes et du blé, mais la production des pommes et la production du blé sont sujettes à des rendements d’échelle croissants. Cela impliquerait, par exemple, que doubler la quantité de terre et le temps de travail consacrés à la production, disons, des pommes, ferait plus que doubler la quantité de pommes produites.
Dans le Tableau 2.4, vous pouvez observer que si 25 hectares et un quart du temps de travail sont consacrés à la production de pommes, 625 tonnes de pommes seront produites. Si l’on double la surface de terre jusqu’à 50 hectares et le temps de travail, la production de pommes est multipliée par 4, soit 2 500 tonnes de pommes. Quant à la production de blé, elle correspond, pour chaque surface, à un dixième du nombre de pommes produites.
Imaginez que Carlos et Greta restent en autarcie, chacun disposant de 100 hectares et divisant leur terre et leur force de travail de façon égale entre les pommes et le blé : ils produiraient chacun 250 tonnes de blé et 2 500 tonnes de pommes. La production mondiale serait alors de 500 tonnes de blé et de 5 000 tonnes de pommes.
Cependant, si l’un d’eux se spécialisait dans le blé et l’autre dans les pommes et qu’ensuite Greta et Carlos partageaient la production en parts égales, ils obtiendraient chacun deux fois plus de blé et de pommes qu’en l’absence de spécialisation. En effet, la production mondiale serait de 1 000 tonnes de blé et de 10 000 tonnes de pommes.
L’avantage de la spécialisation ne vient pas ici d’un avantage comparatif lié à une différence de productivité ou de dotations entre Greta et Carlos. Cet avantage est dû aux rendements d’échelle croissants permis par la spécialisation dans une seule production. Carlos et Greta sont plus efficaces en produisant chacun une grande quantité d’un seul bien, peu importe lequel
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